festen-7

Élèves en immersion : entre théâtre et cinéma

Cinéma ou théâtre ? Un visionnage captivant pour les élèves toulousains. 

 

Ce 20 et 21 novembre dernier, les élèves Réalisateurs/Monteurs, Bachelor Design d'Espace et Design Graphique ont pu assister à la représentation de la pièce "FESTEN" de Thomas Vinterberg et Mogens Rukov au théâtre de la Cité Toulouse.

 

La pièce, mise en scène par Cyril Teste, a su emmener nos élèves ACFA Multimédia et Studio M au coeur de la tourmente familiale de "Christian", le protagoniste, qui a perdu sa soeur et décide de révéler la face noire de ses parents lors d'un anniversaire.

 

C'est en combinant théâtre, dispositif cinématographique et illustration olfactive que le metteur en scène immerge les spectateurs dans un univers bien particulier : entre tradition et contemporain, image mondaine et secrets libérés.

 

festen

 

Ecran tactile pour festin nu

Un texte de Cyril Jouhanneau et Hélène Blain

 

Des spectateurs qui sont des convives qui sont des spectateurs. Des senteurs, vertes. Un décor, des coulisses. Un décor, des décors. Une scène, un écran. Des acteurs, des cadreurs, des acteurs qui sont des cadreurs. Une toile, un cadre.

Le cadre d’un festin. Un petit monde (sur)cadré. Un patriarche qui cadre son monde. Des enfants qu’il ne peut encadrer. Des enfants à recadrer. Enfance, offense, enfer. Orphée tirant Eurydice hors du cadre. L’Enfer. Christian ramenant Linda dans le cadre. L’offense.

Briser le cadre. Lever le voile. Déchirer la toile. Crever l’écran. Œil pour œil. Ouvrir l’œil. Écarquiller. Les œillères. Le crime, lacrymae rerum.

Un festin, donc. Qui fait au soir les langues se délier. Un toast, un choix. Un bain, donc. Un verre, le verbe. Un aveu, vert. Vertement. Verre de rage. Le verbe vrai, le verbe juste. Les verbiages. La blague, le déni, le revers. La poudre aux yeux. Les faux-semblants, les fake news, le repli sur soi. Marcher pieds nus sur du verre.

La vérité s’immisce, le mensonge se hérisse. Le vernis, l’image, la réalité. Le lustre. L’écran vibre le réel, l’image déploie la réalité. L’écran recrache la vie. Le détail, brut, écœurant. L’essentiel. Le souvenir, intact. Écran sous un crâne. L’écran se fait écrin. Capte, capture, projette, convie à partager le poison. Le nectar. Le champ, le contre-champ, le hors-champ, concomitants. Écran tactile – touché, coulé.

Des spectateurs, des convives. Qu’on vive jusqu’à ce que la nausée. La folie affleure, à lier. L’âme se cogne aux recoins du décor. Le décor se déplie en décors qui grondent sous le décor. Des corps. Branlent, s’ébattent, se battent, s’étreignent, dansent, rampent, tournoient, croulent. S’effondrent. Se relèvent. De nouveau à la vie conviés. Le geste juste.

Encore des corps, mouvants. Émouvants. Un décor, bien trop lisse, où glisse le mouvement. Transparence. Côté « plateau », la fête qui crisse. Côté  « coulisses », strates humaines invisibles mises à nu. Et les visages sur l‘écran qui remet tout en place. Côté « cour« , une cuisine qui se dévoile le temps d’un festin préparé, servi sous nos yeux. Côté « jardin », un piano, un tableau, un Corot camouflent l’intimité. Une, deux, trois chambre(s) avec salle de bains. Cœur du drame. Chambre claire, camera oscura. Extimité. L’artifice, la technique, l’art. La caméra embedded emporte. De visu les décors coulissent.  S’ouvrent, se referment. Une paupière. Une poussière dans l’œil. Un fond de tiroir, un fond de marmite, un fond de mémoire, un fond de vérité. Sortir par les yeux, écran lacrymal.

L’écran blanc se fait linceul d’éternité, de sérénité. L’écran blanc rempart à la nauséeuse omniprésence des écrans bruns.

L’écran accroche la toile. Les branches accrochent le vent. Un nouveau souffle. Une bourrasque d’émotions. Des senteurs, essences humides. Un festin originel. Le repas de bébé. Lumière. Le vent dans les feuilles. The Beauty of Moving Wind in the Trees. D.W.Griffith. Fi de la technique. Le geste primordial. L’essence du cinéma, le théâtre des sens.

La Beauté, le dernier des voiles qui recouvrent l’Horrible.